« Il y a un certain nombre de sujets sur lesquels les Présidents Macron et Sall doivent travailler de concert. C’est d’abord la question migratoire qui fragilise autant les pays africains qu’elle perturbe les pays européens. Il y a ensuite le dossier du terrorisme avec une intensification des violences sur les rives sud de la Méditerranée. Il faut avoir à l’esprit que sur la totalité des attentats commis depuis une trentaine d’années, moins de 1% s’est déroulé en Europe contre 44% survenus sur le continent africain.On voit là qu’il y a une très forte responsabilité des pays de la rive nord pour faire en sorte que ces attentats ne perturbent pas plus que de raison la stabilité, la gouvernance et les capacités démocratiques des pays de la rive sud », analyse pour Sputnik Emmanuel Dupuy, président de l’Institut prospective et sécurité en Europe (IPSE).
« L’Union africaine et l’Union européenne ont des convergences évidentes. Si on prend, par exemple, le fait que 37% des importations africaines viennent de l’UE et que 38% des exportations africaines vont vers l’UE, on constate une forme de convergence économique qu’il est de l’intérêt des deux continents de prendre en charge ensemble pour que la balance commerciale s’équilibre afin de ne pas créer une sorte d’asymétrie entre les deux rives de la Méditerranée », suggère le président de l’IPSE.

Guinée-Bissau: les zones d’ombre d’un putsch manqué contre Umaro Sissoco Embalo
Les questions économiques sont sans doute importantes, mais dans le contexte des très mauvaises relations entre le Mali et les pays européens dont la France, les sujets qui fâchent pourraient s’imposer de fait dans la capitale de l’Europe.
« Il est possible que le sommet de Bruxelles n’ait pas comme point prioritaire la question migratoire, mais le retour à l’ordre constitutionnel puisqu’il y a non seulement la crise malienne, mais il y a aussi un coup d’État au Burkina Faso, une tentative de putsch qui a failli renverser le Président Umaro Sissoco Embalo de Guinée-Bissau, le cas de la Guinée-Conakry. Il ne faut pas oublier le Tchad ou Mahamat Idriss Déby vient de remettre en cause les conditions du pré-dialogue avec les politico-militaires, donnant l’impression que lui-même veut prolonger aussi la transition. Il est vrai que la France ne dit pas grand-chose sur le cas singulier du Tchad [mais] la question des transitions non démocratiques ne se pose pas seulement au Mali« , rappelle Emmanuel Dupuy.

#🇨🇩RDC: Le Président de la République DR FATSHI est attendu ce Week-end à Addis Abeba
En conflit ouvert et violent avec la France, le Mali est encore sous le coup de dures sanctions de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour non respect du calendrier électoral auquel le gouvernement s’était initialement engagé. Mais le spectre de la crise qui s’étend à d’autres pays laisse penser à un effet domino.
« Le séisme politique inédit qui secoue l’Afrique de l’Ouest a pris de court les leaders, les opinions et surtout la CEDEAO. Cette situation est aggravée par le jeu d’influence des grandes puissances qui entraîne un basculement géopolitique brutal dont les effets se font déjà sentir. La CEDEAO est divisée et le G5 Sahel a explosé. C’est dans ce contexte de tensions et de complexités politiques, sécuritaires, géopolitiques et géostratégiques que Macky Sall assure la présidence de l’Union africaine. Emmanuel Macron et l’UE doivent aller dans le sens de la désescalade pour réparer ce qui est dégradé dans les relations Afrique-Europe. Je fais confiance à la disponibilité du ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop. Il y va de la stabilité géopolitique de la région », affirme Alioune Tine.
« Un sentiment anti-français largement partagé »
« Ces jeunes africains ont une mauvaise image de la France. C’est un sentiment partagé qu’il faut avoir à l’esprit. C’est une dimension à laquelle le Président Macky Sall ne pourra pas échapper: les populations de la CEDEAO sont peut-être en porte-à-faux ou en tout cas se sont montrées très solidaires des populations maliennes qui, elles, souffrent déjà le plus des sanctions prises contre les autorités maliennes », note le président de l’IPSE.